samedi 15 décembre 2007

Les côtes de Moselle et de Meuse

Cette simplicité apparente de la morphologie résulte pourtant d'une évolution complexe qui n'a pas fini de passionner géologue et géographes et de susciter des controverses presques aussi ardentes que celles que provoque la genèse des Alpes !

Depuis les études ingénieuses et un peu simplistes de l'Américain W.M. Davis, les objections ont surgi et ont fait naître non seulement des hypothèses valables pour la Lorraine, mais des théories nouvelles sur le relief de côte.

La carte géologique découvre l'écorché de ce relief apparemment de tout repos: en auréole arquées vers l'est, elle montre, des Vosges au Barrois, d'abord les couches du trias - calcaire et marnes irisées - qui intéressent à peine notre département, puis le lias marneux où, malgré la présence de bancs calcaires (à gryphées notamment), l'érosion a facilement déblayé les plaines mollement ondulées qui s'étendent à l'est et au sud-est de Nancy: Vermois et Xaintois ; puis les cent mètres de calcaire bajocien - recouvrant cinquante mètres de marnes sableuses (toarcien) forment une masse d'inégale résistance qui s'est magnifiquement prêtée à l'apparition de la Côte de Moselle ; on la suit parfois bien loin du fleuve qui lui donne son nom, de Grimonviller à Pont-à-Mousson, précédée de ces buttes fameuses, vouées parfois au culte, le plus souvent à l'art militaire: le Signal de Vaudemont dominant le Xaintois de plus de deux cents mètres, le Mont d'Anon, le Grand Couronné de Nancy ; vers l'ouest, le géologue suit le lent enfoncement du bajocien- bathonien sous les marnes épaisses du callovien et de l'
oxfordien ; c'est la Woëvre, fertile et humide ; à leur tour, ces marnes argileuses disparaissent sous les bancs puissants du calcaire corallien où cent ruisseaux coulant vers l'est ont déblayé les Hauts de Meuse, improprement appelés côte de Meuse, car la Meuse coule bien loin derrière la dite Côte ; c'est le rempart naturel le plus imposant, et lorsqu'on le voit de la Haye, précédé de quelques sentinelles comme le trapèze du Mont Saint-Michel de Toul, la butte du Mont Sec, on en comprend l'austère grandeur: Verdun est derrière.

L'alternance des affleurements calcaires et argileux explique donc le développement de ce relief de côte ; de là aussi, cette diversité des sols et de la végétation - pâturages de vrais causses, manteau forestier, terroirs à céréales, étangs, herbages de fonds humides... - que nous retrouverons plus loin.

Les Côtes se sont-elles dégagées facilement de cette succession d'auréoles d'inégales résistance à l'érosion ? On l'a cru longtemps. Mais l'étrange tracé des cours d'eau, tous dirigé vers le nord et non vers le centre du Bassin Parisien comme la pente des couches semblait les y avoir condamnés, compliqué de détournements et de captures de certains d'entre eux, l'absence de parallélisme entre côtes et rivières ont amené une révision du schémas admis depuis Davis. On en est venu, à force d'enquêtes sur le terrain, à faire du Val de l'Ane, insolite couloir entre Toul et la Meuse, ou du méandre de la Moselle à Liverdun, des cas morphologiques absolument typiques.

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